Préserver l’amour dans le couple est une co-création indispensable qui passe par une meilleure connaissance de soi en premier lieu.
Car avant d’avoir un NOUS, il doit y avoir deux JE. JE est un monde à lui seul. Mais, qui suis-JE? Alors même que je me connais si peu, comment puis-je te connaître et te rencontrer? Alors que je me découvre – et que je découvre mes blessures, mes besoins, mes manques – à l’occasion de toi, révélateur de mes ombres et de mes lumières, comment allons-nous co-construire notre relation ?
Deux histoires de vie qui se rencontrent pour former un « couple »
Si le couple permet à chacun de se connaître davantage et de créer un espace, une possibilité d’avancer ensemble, chacun est d’abord une personne dépositaire et héritière de sa propre histoire. Et cette histoire va influer sur notre façon d’être dans la relation et dans l’intimité. A fortiori dans la sexualité, car c’est dans la sexualité que se joue à notre insu qui nous sommes vraiment. Nous ne sommes rarement que deux dans un lit, nous avons nos parents et notre famille, nos éducateurs, nos figures d’autorité, nos précédents partenaires, toutes les personnes importantes avec lesquelles nous avons interagi et qui ont eu un impact sur nous. Alors, dans cet ouvrage particulier, composé de toutes ces briques extérieures à nous, qui est vraiment JE? Qui suis-je une fois soulevées et dévoilées les couches de mentalisations, d’introjects, d’éducation, de principes, de jugements?…
Comment mieux se connaître ?
Le travail sur soi est une démarche qui permet de considérer ces différentes strates, ces différents éléments qui nous ont façonné afin de déterminer ce que nous gardons de bon pour nous et ce que nous rendons aux autres et d’en faire le tri. Cela nous permet de regarder les endroits blessés et d’en prendre soin. La relation de couple étant un espace d’intimité relationnelle, on se laisse prendre aux jeux des vieilles histoires, des vieilles blessures et des besoins non satisfaits, dans le but de les mettre en conscience et d’en faire quelque chose. Nous devons décoller nos projections de l’autre qui n’est pas un parent mais une vraie personne, afin de pouvoir apprendre à le connaître et le rencontrer vraiment.
Comment éviter de souffrir dans son couple ?
La plupart des relations que nous vivons sont névrotiques. C’est-à-dire source de souffrance car prises dans des tentatives d’apaiser d’anciennes douleurs liées à des besoins non ou mal satisfaits, à des maltraitances ou à des violences subies lorsque nous étions un enfant démuni, vulnérable et en totale dépendance de personnes elles-mêmes en souffrance. Notre vie est jalonnée de moments embarrassants, douloureux, honteux que nous tentons de cacher pour nous montrer sous notre meilleur jour et être aimé. Or, le tableau est incomplet ; notre part d’ombre fait partie de notre humanité, nous fait être humain. S’individuer, c’est progressivement se reconnaître avec ces parts désavouées et ces lumières, les accueillir, les accepter, les aimer car elles font qui nous sommes et ce que nous pouvons offrir à l’autre dans un dévoilement intime.
Faut-il se montrer parfait.e ?
Personne n’est parfait, personne ne peut l’être. Chacun d’entre nous a commis des erreurs, certaines terribles, a appris des leçons, peut-être indigestes, a vécu des événements, parfois atroces, s’est amputé de parties de soi, souvent lumineuses. Tout cela fait qui nous sommes et nous poursuivons notre croissance en réparant ce qu’il y a à réparer et en remettant le projecteur là où la lumière s’est estompée. Notre corps porte nos marques, nos stigmates, nos cicatrices, nos symptômes, nos charges émotionnelles, il est témoin de notre vie et nous y sommes incarné. C’est tout cela JE.
JE, c’est aussi le fruit d’une rencontre de deux parents, et au-delà, de deux lignées, de deux traditions, de deux mondes très différents et avec lesquels nous avons appris à conjuguer, avec tiraillement, écartèlement parfois, sans savoir du coup que nous avons déjà cette capacité en nous, de faire du lien avec des parts très différentes.
Faire confiance à son corps
La relation permet de faire ce travail de mise en conscience de notre plasticité liée à notre nature. Ce que nous savons faire en nous, nous devons apprendre à le refaire à l’occasion de l’autre. Nous n’en avons juste pas appris le chemin parce qu’il est cellulaire et inconscient – ni psychologique, ni émotionnel et encore moins cérébral. Notre corps sait, sent ce qui est juste et bon pour nous. Si nous lui laissons la possibilité de ressentir, il est un merveilleux guide car il sait, au fond de lui, déjà le faire.
Alors, notre corps sait que JE peut rencontrer un autre JE et apprendre à tisser un NOUS et que cela peut être agréable ou pas. Mais c’est toujours une aventure.
Le couple grandit au travers des difficultés
C’est cette aventure de l’intimité qui sera à la fois le contenant de nos dévoilements et le creuset de cette alchimie relationnelle. JE suis un être qui accueille qui je suis, qui commence à assumer qui je suis, avec mes qualités et mes ombres, à m’aimer avec mes parties inavouables, à devenir tendre et indulgent envers moi-même. Avec l’autre qui – d’une manière ou d’une autre – va appuyer sur un de mes boutons névrotiques, je risque de retomber dans mes vieux travers. Alors, si je prends du recul, si je saisis cette occasion d’ajustement pour transformer une vieille blessure en une nouvelle ressource, un nouvel apprentissage, une nouvelle étape dans la relation, dans l’alliance relationnelle, alors le NOUS émerge et commence à exister.
Le NOUS est une équipée où chaque JE est libre de prendre cet engagement relationnel, pour peu qu’il se connaisse un peu et sache ce qui préside à ses décisions et à ses actions: ses besoins, ses envies, ses craintes, ses blessures, ses projets; ce qu’il veut faire de sa vie, ce qu’il veut se donner à vivre dans sa vie, dans la réalité. Dans le cas contraire, le NOUS l’amènera à affiner et définir via l’ajustement ce qui est bon pour lui, pour l’autre et pour la relation. Et parfois dans la confrontation ou la crise.
Grandir et prendre la responsabilité de sa vie et de sa part dans la relation, c’est faire de vrais choix et cela peut être douloureux. Car choisir, c’est renoncer.
Extrait de Le couple, l’intimité et la sexualité de Carlotta Munier aux éditions du Souffle d’Or 2021
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