Le cadre en sexothérapie est fondamental. C’est sur ce socle que se tisse la relation thérapeutique. Il doit apporter sécurité et conditions pour favoriser une forme d’intimité. C’est pourquoi le praticien doit être au clair sur son cadre de travail, son cadre de référence, le cadre déontologique et le cadre des séances qu’il propose.
Le cadre de référence
Le cadre de référence est le paradigme théorique et clinique de la formation de base et de l’exercice professionnel du praticien avant même qu’il ne se spécialise en sexothérapie. Ce sera son socle, ses fondations sur lesquelles il s’appuiera pour accompagner ses clients en tissant progressivement avec les éléments apportés pendant la formation en sexothérapie. Ce qui a été abordé dans l’article sur la posture. Selon le métier de chacun, ce tissage peut prendre un certain temps d’ajustement car parfois la posture diffère. De la simple écoute active à l’intégration de la dimension corporelle et mouvementale par des exercices, le praticien devra s’entraîner pour acquérir fluidité et souplesse. Une thérapie sexuelle ne pouvant par exemple ignorer la dimension corporelle et génitale, la seule théorie ne suffisant pas, ou a contrario, ignorer l’imaginaire érotique. Des journées d’entrainement et de supervision seront bénéfiques pour cette intégration. De plus, l’aisance dans son propre cadre de base sera garante de repères solides lorsque la relation thérapeutique tangue du fait de la personnalité du client ou de ce qu’il vient bousculer en nous. C’est une des raisons pour lesquelles l’Institut ne forme pas de débutants. Un cadre et une posture clairs, mis à l’épreuve de l’expérience sera le gage d’une sécurité, autant pour le client que pour le thérapeute.
Le code de déontologie
En sexothérapie, le cadre déontologique est encore plus strict qu’il ne l’est pour un praticien. Pour rappel, « La relation client/Praticien en Sexothérapie est une relation professionnelle centrée sur la protection et le bien-être du client. Le Praticien en Sexothérapie considère la personne comme un sujet unique et libre, il est conscient de l’importance de la relation, de l’influence et de la dépendance inhérentes à la situation. A cet égard, il s’engage à respecter sa dignité, son intimité, son autonomie, ses options philosophiques ou religieuses. Le Praticien en Sexothérapie sait qu’il porte une responsabilité sociale certaine parce que ses recommandations et actions professionnelles peuvent modifier la vie de ses clients et de leur environnement. Il s’abstient donc d’exploiter ses clients financièrement, sexuellement, émotionnellement, affectivement, politiquement, idéologiquement, dans son propre intérêt ou dans l’intérêt de toute autre personne ou institution. […] Le contact physique, s’il peut participer au processus thérapeutique, nécessite le consentement du client et ne se portera en aucun cas sur les parties génitales. »
Transfert et contretransfert
A l’instar de la thérapie « classique », dans notre champ de la sexualité, la dimension transférentielle et contre-transférentielle est activée et peut être érotisée. Cela peut fragiliser le praticien qui est un être humain sexué, un sujet qui peut être désirant comme désiré. C’est pourquoi il doit, afin de soutenir le déploiement de son client dans l’audace et la sécurité, s’engager strictement et sans réserve aucune au non passage à l’acte sexuel. Les ambiguïtés et implicites doivent être explicités pour être mises au travail et le recours à la supervision systématique. Le cas échéant mettre un terme à la thérapie.
En effet, quoi de plus narcissisant — ou embarrassant —, parfois, qu’un client qui nous révèle son désir pour nous ? Comment gérer notre propre désir ou envie de rapprochement à l’égard de cette personne ? Comme ne pas céder à une demande d’aller prendre un café par exemple ? Comment repousser les avances de ce client, tout en soutenant le mouvement d’aller-vers qui s’amorce ? Comment faire lorsque nous constatons que nous nous habillons de cette façon parce que nous savons que nous allons recevoir cette personne-là ? Dans la sexothérapie, ces éléments que nous vivons parfois dans notre pratique, sont bien plus exacerbés, du fait même du thème abordé et de l’intimité qu’il confère.
Un cadre sécure
Cette dimension du cadre sécure, du strict avec un non passage à l’acte sexuel garanti n’est pas négociable pour nous. C’est la limite absolue sur laquelle le client peut se confronter, tenter de franchir, et qui sera celle sur laquelle il peut se structurer. Dans notre métier, cette transgression n’est jamais au service du client, bien au contraire et est souvent qu’une énième répétition pour lui, qui confirme qu’il est une personne qui peut être (encore) abusée. Cette transgression ne peut être que révélatrice d’une fragilité du thérapeute, d’une zone aveugle, d’un manque ou d’un déséquilibre dans sa propre vie qui le fait déraper. Là, la supervision est indispensable pour rester ferme. Cette fermeté sera thérapeutique.
C’est pour toutes ces raisons que la participation à toute formation à l’IFFS est subordonnée à la signature du code de déontologie de l’école, qui se réfère au Code général de déontologie de l’ Association Européenne de Psychothérapie (EAP), à celui de l’Association Européenne de Gestalt-thérapie (EAGT), celui de la Fédération Française de Psychothérapie et Psychanalyse (FF2P) et du SNPPsy, ces codes étant compatibles et complémentaires. Le praticien est bien évidemment soumis à la confidentialité, donc au secret professionnel absolu, sauf s’il recueille des informations indiquant que des enfants pourraient être en danger. Dans les cas d’incestes et d’abus, drames qui viennent régulièrement être livrés dans notre cabinet, cette situation peut surgir et met le thérapeute dans l’inconfort de devoir briser le secret professionnel. Là également la supervision peut être un espace de soutien et de prise de recul, de même que le soutien d’une fédération ou d’un syndicat auquel le praticien est déjà adossé dans son exercice (FF2P, SNPPsy par exemple).
Enfin, le praticien doit connaître les différents référentiels en termes de normalité, pratiques et comportements sexuels humains et le cadre légal français.
Le cadre de l’accompagnement et l’écologie du thérapeute
Afin de pouvoir accompagner ses clients au plus près d’eux-mêmes, le praticien doit être en confort. Cela signifie que c’est lui qui décide de son propre cadre de travail, un cadre écologique, bon pour lui. À savoir le cadre des séances : durée et tarif des séances, fréquence, conditions d’annulation de séance et report de RDV, modalités (présentiel, téléphone, Skype…), modalités de clôture de la thérapie ; la démarche sexothérapeutique dont les axes thérapeutiques (cognitif, émotionnel, corporel) et les modalités thérapeutiques (verbale, mouvementale, créative, technique…).
S’il n’est pas à l’aise sur l’un de ces points, quelque chose n’est pas bon pour lui, son confort, son aisance, sa posture, il ne pourra être suffisamment sécure, soutenant pour ses clients, il ne sera pas en mesure d’offrir les meilleures conditions pour favoriser les confidences, les explorations, les expérimentations, etc. Par ailleurs, il doit recueillir l’accord de son client sur ces différents points.
Dans le prochain article, j’évoquerai la relation thérapeutique. Une révision pour la plupart, et une déclinaison dans notre champ spécifique qui révèle de manière saillante la nécessite d’avoir des compétences éprouvées dans l’accompagnement des personnes.
Bonne lecture
Carlotta Munier
Directrice
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