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Hier soir, une dame d’une soixantaine d’année m’a dit avoir très envie de trouver des solutions pour qu’enfin son mari se mette à exprimer ses émotions. Une envie partagé par beaucoup de femmes. Mais pourquoi les hommes rechignent-ils tant à exprimer leurs émotions ?


Des raisons culturelles

De manière générale, les hommes n’expriment ni ne montrent leurs sentiments, leurs peurs, leurs faiblesses. Culturellement, ils ne sont pas encouragés à dévoiler leurs sentiments profonds. Ils sont dans le contrôle quasi permanent de leur visage, de leur corps et n’en sont souvent plus conscients. Et les femmes s’en plaignent.
En fait, pour l’homme, laisser paraître ses émotions, c’est montrer au grand jour sa faiblesse et sa vulnérabilité. Et c’est souvent le contraire de ce qu’on lui a inculqué en termes d’éducation sur le comportement viril. Se vivre faible ou fragile le met dans un jugement négatif sur lui-même. Et montrer ses sentiments peut générer de la honte.
Car l’homme doit être à la hauteur en toute circonstance, du moins c’est ce qu’il a appris. S’il montre ses émotions, s’il dévoile son jeu, il montre qu’il n’est pas aussi performant qu’il devrait l’être selon les normes de la virilité. Il préfère se retrancher derrière un masque, une hyperactivité, des mécanismes de fuite. Il dénie alors ses besoins d’attention, d’attachement, de dépendance, d’amour qu’il considère comme des défauts ou comme préjudiciables. Et il se tait.


Ils n’ont pas appris

Ceci dit, le silence d’un homme ne veut pas nécessairement dire qu’il ne veut pas volontairement communiquer ses sentiments. En effet, beaucoup ont en fait des difficultés à percevoir leurs sensations, leurs ressentis et leurs émotions. Tout simplement, personne ne leur a appris ou ils s’en sont coupés très tôt. Ou alors, ils ne savent pas mettre de mots sur ce qu’ils ressentent, n’en ont pas acquis le vocabulaire. Sans oublier que les générations d’hommes qui l’ont précédé ont vécu dans ce silence et n’ont pu reconnaître et soutenir leurs propres fils.

 


Dire c’est risquer d’être vulnérable

La vulnérabilité est un corollaire de l’intimité. Car pour oser se dévoiler, se dire et se montrer tel que l’on est, sans fard, il faut pouvoir se trouver suffisamment en sécurité intérieure et relationnelle, être en intimité avec soi (sentir et reconnaître) et avec l’autre (oser dire et pouvoir entendre ce que cela crée chez l’autre).

La vulnérabilité apparaît sous le regard bienveillant, attentif, ému de l’autre, c’est un sentiment qui se place sur le plan du cœur, de l’ouverture du cœur et cela peut déstabiliser une personne, d’autant si elle s’est forgée une muraille d’impassibilité. Il ne sera pas aisé pour elle d’oser ébrécher les murs pour que passent les émotions, la sensibilité. Or, l’homme est sensible. Tous les êtres humains sont sensibles ou l’ont été. Si cette sensibilité est réprimée, refoulée, niée, rejetée c’est suite à des situations relationnelles rudes, dures, maltraitantes voire violentes.

L’homme devant être fort, sa sensibilité ne peut être accueillie par sa communauté, elle passerait pour de la faiblesse, trait inacceptable au regard des critères de la virilité. L’homme est alors coupé d’une dimension essentielle (dans le sens Essence) de lui-même. Réhabiliter et assumer sa sensibilité et sa vulnérabilité sont des pas fondateurs pour se vivre entier et debout. Et cela peut se faire à l’occasion de la relation (de couple, thérapeutique), mais également à l’occasion de stages, de groupes d’hommes (de paroles ou thérapeutiques).

Extrait de La Sexualité masculine : puissance et vulnérabilité de Carlotta Munier: