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Le désir ? Le plaisir ? Le devoir ? Les pulsions ? Mais qu’est-ce qui nous donne envie de faire l’amour ?

Dans le métier de sexothérapeute nous rencontrons des gens très différents qui, au-delà de leur trouble, veulent (re)trouver une sexualité saine et épanouie. Cette sexualité est fonction de leur imaginaire, de leurs représentations, de leur histoire, de leur culture, de leurs idéaux, de leur génération, de leur genre, de leur âge. Tout cela s’inscrivant dans une motivation : pourquoi fait-on l’amour ?
Nous devons pouvoir accueillir ces motivations avec ouverture et sans jugement.

La sexualité de la découverte

En ce qui concerne ce sujet vaste qu’est la sexualité, si le développement psychosexuel s’est fait de manière relativement fluide, la plupart des gens sont curieux ; ils veulent apprendre et essayer. Chaque personne est différente, chaque expérience unique, chaque relation singulière. La découverte, c’est ce qui se passe au début d’une histoire, où l’on découvre le corps de l’autre, et l’on découvre le sien à l’occasion des caresses de l’autre. C’est un voyage, une aventure des sens, des saveurs, des senteurs, de la peau, du chuchotement et autres registres érotiques. C’est l’espace où l’on prend le temps des préludes. Un espace à cultiver lorsqu’on s’est un peu perdu de vue, lorsque la sexualité est devenue routine et le désir s’est endormi.

Certains, sous l’influence d’une histoire personnelle troublée (éducation stricte, préceptes religieux, ignorance, complexes, peurs, interdits, culpabilité, maltraitance, attouchement, violences sexuelles, etc.), ne sont guère motivés par cette découverte, ni d’eux-même, ni de l’autre. C’est un espace qu’ils vont délaisser ou surinvestir dans une hypersexualité qui ne peut se « vivre » sans être coupé de soi-même, de son corps, de son cœur et de son âme et du coup en « zappant » cette phase et en entrant directement dans l’excitation. Notre rôle est précieux à cet endroit, nombre de personnes venant en consultation ayant une histoire difficile.

La procréation peut être une motivation

Pour certains, l’activité sexuelle est (ou doit être) orientée exclusivement vers la procréation.
Hormis quelques macaques ou bonobos, seuls les humains sont capables de dissocier sexualité et procréation. La femme peut être prête à tout pour procréer. Même si elle n’aime pas la sexualité, elle accepte d’augmenter la fréquence des relations. Après avoir été comblée par la maternité, elle pourra se désintéresser de nouveau de la question, avec un impact sur l’autre et sur le couple.
À contrario, lorsque la capacité de concevoir naturellement fait défaut, la sexualité devient un espace de rythme, de mesure, mécanisé et organisé par le médical et médicalisé (surtout pour la femme). La Procréation Médicale Assistée est souvent un parcours du combattant qui abîme le couple et son intimité. Le sens de l’érotisme, du plaisir et de la rencontre vraie se perd au profit des « fenêtres » de fertilité. Le couple qui aura pu enfin avoir un enfant aura à se faire aider pour retrouver le chemin du désir, de la spontanéité, du jeu, de la connivence.
Celui qui n’aura pas d’enfant aura de grandes difficultés à retrouver une sexualité agréable et sera, dans de nombreux cas, voué à la séparation.

Les relations sexuelles par devoir

Patriarcat oblige, nombre de femmes vont accepter des rapports sexuels par devoir, par sacrifice, par obligation, pour faire plaisir à leur compagnon, pour retenir leur homme. Ou par peur d’être délaissée, peur d’être abandonnée, peur de l’infidélité. Elles font l’impasse sur leur désir, qu’elles ne ressentent d’ailleurs pas, mais surtout sur leur vitalité, leur existence même. Le devoir conjugal a encore droit de cité dans certains couples. Effrayant ! Nous avons là un espace où l’on peut accompagner cette femme à se sentir ses désirs, ses envies, ses limites et à apprendre à se positionner, cet homme à écouter et respecter les limites de l’autre. Cela s’appelle le consentement. Chez les jeunes, cette problématique est malheureusement très fréquente, due à l’invasion de la pornographie de plus en plus tôt.

La sexualité marchande

Depuis que le monde est monde, la sexualité se monnaie et il n’y a pas que les prostituées qui couchent pour de l’argent ! Le sexe est un jeu de pouvoir, une relation de dépendance, d’assujettissement. À observer certains couples, on se croirait en plein marchandage. Tout est calculé, pesé. Si je te donne quelque chose, en échange tu dois me donner cela. La sexualité peut aussi faire partie de ce jeu malsain. Notamment en échange d’argent ou de liberté.
Il y a aussi cette sexualité du plaire, de la séduction. Pourquoi, pour quoi ? Lorsque la relation est dissymétrique, il est rare que la sexualité ne le soit pas. Mais finalement qui a le pouvoir ? Celui qui exige ou celui qui refuse ?
Certains n’ont pas conscience de ces jeux de pouvoir et nous pouvons les accompagner à démêler ce qui se joue. Ceux qui en ont bien conscience ne viendront pas consulter.

La sexualité pour l’hygiène ou l’anxiété

La sexualité n’est pas un besoin. En revanche, pour ces hommes qui ne font pas de différence entre pulsion, excitation et désir, leur attitude vis-à-vis de leur partenaire n’est pas toujours ajustée.
En effet, pour certains, avoir un rapport sexuel c’est libérer le trop-plein de stress, se défaire de tensions voire de frustrations et goûter pendant quelques minutes la paix du corps et de l’esprit. Oublier ses tracas, apaiser — temporairement — son anxiété dans la déferlante des substances ainsi produites. Et l’autre… ll n’existe tout simplement pas. A quoi « sert-il » ?
C’est toute la différence entre avoir un rapport sexuel et faire l’amour. Le premier concerne l’individu et son excitation, le second concerne la relation, le partage.

La sexualité de la communication et de la relation

C’est une sexualité qui permet de communiquer ses sentiments amoureux à la personne qui partage notre vie. Faire l’amour est alors une façon de dire des mots d’amour à l’autre.
La plupart des femmes recherche une relation plutôt qu’une performance. Le rapport sexuel ne sera pas un « rapport », mais un moment, un espace-temps, une occasion qui n’aura de sens et de valeurs que s’il lui permet de communiquer ses sentiments amoureux à l’homme avec lequel elle fait vraiment l’amour.

Une méconnaissance majeure qui engendre incompréhension entre hommes et femmes, c’est que la femme, quand elle fait l’amour, le vit en elle. Elle accueille dans son sexe, dans son corps et dans son cœur une autre personne. Elle s’y ouvre et est entièrement traversée physiquement, vibratoirement, énergétiquement et émotionnellement par ce contact. Une femme qui fait l’amour avec un homme prend le risque alors de se laisser transformer par l’expérience et du coup de s’attacher à la personne qui la lui fera vivre. Ceci dit cela n’est pas exclusif des femmes, de plus en plus d’hommes ont cette sensibilité.

Cela ne signifie pas que la sexualité du seul plaisir pour le plaisir est à déconsidérer. Cela veut dire que pour beaucoup de femmes, cela change profondément le rapport à l’autre. Pourtant, peu d’entre elles le perçoivent d’emblée (ça vient par la suite) et encore moins d’hommes ne peuvent l’imaginer car pour eux, cela se passe presque en dehors d’eux. Ce qui peut créer du trouble dans l’interaction, c’est que cet engagement, qui est loin d’être uniquement corporel, engendre des droits (un accès à une intimité plus grande) et des devoirs (vérifier sans cesse le respect, l’adhésion*)…
La plupart des personnes qui viennent consulter se situent dans ce registre-là. L’homme veut pouvoir être en capacité d’honorer sa compagne. La femme veut pouvoir être en capacité d’accueillir son homme.

La sexualité hédoniste

L’hédonisme suppose de cultiver l’art de vivre le désir, le plaisir, l’érotisme. Cela demande curiosité, imagination, complicité, jeu. Il faut inviter le désir, l’éveiller, l’évoquer, le titiller, le convoquer même par des scénarii, des histoires, des jeux, des confidences, des confessions. Il s’agit alors d’anticiper le plaisir qui en découlera et le faire se dérouler, se déployer, jouer de multiples variations de frémissements, de sensations, d’émotions, de vibrations. Cette sexualité demande de prendre le temps. Vraiment. Elle ne s’accommode pas de performance, de brutalité, de non-respect. Elle est sincère et véritable. C’est une disposition d’esprit dans un cadre dans lequel la connexion est déjà préexistante.
Au-delà de la résolution d’un trouble, nous pouvons accompagner les personnes à développer cette dimension hédoniste de la sexualité, à inventer leurs formes, à oser de nouvelles choses. On sort un peu du cadre strictement thérapeutique, mais notre écoute et notre pédagogie sont là essentielles. Nous devenons un peu des initiateurs, des coachs.

Et la spiritualité?

Elle dépasse le cadre de nos consultations, mais notre ouverture est soutenante pour ces personnes en recherche.

Vous voyez une fois de plus comme ce périmètre est vaste, complexe, universel et toujours singulier. Notre accueil, notre écoute, notre soutien est fondamental car derrière ces motivations se cache des souffrances, des impasses, des interrogations, du découragement, etc.

Bonne lecture

Carlotta Munier
Directrice

* Quelle différence faites-vous entre consentement et adhésion ?

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